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Prendre la parole en public sans jouer un rôle

  • Ivan Caullychurn
  • il y a 7 jours
  • 5 min de lecture
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Quand la gestion des émotions devient plus importante que la technique

Parler en public fait partie de ces situations où l’on se sent rapidement sommé d’« être à la hauteur ». Voix posée, discours structuré, posture droite, regard assuré. Tout est censé être maîtrisé. Pourtant, malgré les formations, les répétitions et les méthodes, beaucoup de personnes continuent à vivre la prise de parole comme une épreuve intérieure intense.

Et si le problème n’était pas un manque de technique, mais une mauvaise relation aux émotions ?


La prise de parole en public est une expérience émotionnelle, avant d’être une performance oratoire. Une expérience qui peut devenir beaucoup plus fluide et efficace lorsqu’on apprend à travailler avec ses émotions plutôt que contre elles.


Ce qui se joue vraiment avant de parler en public

Bien avant de monter sur scène, de prendre la parole en réunion ou de se lever devant un groupe, quelque chose s’active intérieurement. Peur d’être jugé, crainte de perdre ses moyens, impression de ne pas être légitime, anticipation des regards. Ces réactions ne sont ni irrationnelles ni anormales.

Sur le plan émotionnel, la prise de parole active un mécanisme simple : l’exposition sociale. Être vu, entendu et évalué par un groupe est perçu par le cerveau comme une situation potentiellement menaçante. Le stress qui apparaît n’est pas un bug, mais une réponse adaptative.


Le problème survient lorsque l’on cherche à :

  • supprimer cette réaction,

  • la nier,

  • ou la considérer comme une faiblesse.


Cette lutte interne consomme une grande partie de l’énergie disponible. Résultat : perte de clarté, respiration courte, tension corporelle, discours moins fluide. Ce n’est pas le stress qui fait échouer la prise de parole, c’est la résistance au stress.


Pendant la prise de parole : présence ou contrôle

Au moment de parler, deux stratégies opposées apparaissent souvent.

La première consiste à tout contrôler : suivre le plan à la lettre, surveiller chaque mot, vérifier en permanence si « ça se passe bien ». Cette approche donne parfois un discours correct sur le fond, mais souvent rigide, peu incarné, et émotionnellement plat.

La seconde repose sur la présence. Être présent, cela ne signifie pas improviser sans cadre, mais être attentif à ce qui se passe ici et maintenant :

  • son souffle,

  • son rythme,

  • ses sensations corporelles,

  • les réactions du public.


Cette présence permet d’ajuster naturellement le discours. Une pause devient possible. Un sourire aussi. Le lien avec l’auditoire s’installe. Paradoxalement, c’est en lâchant une partie du contrôle que la prise de parole gagne en impact.


Après avoir parlé : une phase souvent oubliée

La plupart des gens pensent que la prise de parole se termine quand le discours est fini. En réalité, une troisième phase émotionnelle apparaît après coup.

Certaines personnes ressentent un soulagement intense, parfois suivi d’une fatigue marquée. D’autres entrent dans une phase d’auto-critique sévère :

  • « J’aurais dû dire ça autrement »

  • « On a vu que j’étais stressé »

  • « Ce n’était pas assez bien »


Cette rumination peut laisser une trace durable et renforcer l’appréhension pour les prochaines prises de parole. Apprendre à clôturer émotionnellement une intervention est donc aussi important que sa préparation.


L’authenticité : un levier sous-estimé

Contrairement à une idée répandue, être authentique ne signifie pas tout dire ni se mettre à nu. L’authenticité, dans la prise de parole, consiste surtout à ne pas lutter contre ce qui est déjà là.

Une légère nervosité assumée est souvent perçue comme de la sincérité. Une émotion contenue mais reconnue rend le discours plus humain. Le public ne cherche pas un orateur parfait, mais quelqu’un de crédible et incarné.

De nombreuses prises de parole ratées ne le sont pas à cause d’erreurs techniques, mais parce que l’orateur est coupé de lui-même. Trop occupé à « bien faire », il n’est plus vraiment présent.


Le rôle de l’intelligence émotionnelle dans la prise de parole

L’intelligence émotionnelle repose sur quatre compétences clés :

  • reconnaître ses émotions,

  • comprendre leur origine,

  • réguler leur intensité,

  • percevoir celles des autres.


Appliquée à la prise de parole, elle permet :

  • d’identifier son niveau de stress sans le dramatiser,

  • de transformer la tension en énergie mobilisable,

  • d’ajuster son discours à l’état émotionnel du public,

  • de rester souple face aux imprévus.


Cette approche change radicalement la façon d’aborder l’oral. On ne cherche plus à « vaincre » le trac, mais à l’intégrer intelligemment dans l’expérience.


Cas concret : quand la technique ne suffit plus

Prenons l’exemple d’un professionnel habitué aux réunions, à l’aise sur le contenu, mais systématiquement tendu dès qu’il doit s’exprimer devant plus de dix personnes. Il connaît son sujet, prépare ses supports, répète son discours. Pourtant, la voix tremble, le débit s’accélère, et le message perd en clarté.

Le travail ne consiste pas à ajouter une méthode supplémentaire, mais à explorer :

  • ce qui se déclenche émotionnellement avant de parler,

  • les pensées automatiques associées,

  • la relation au regard des autres.


En rétablissant une sécurité intérieure minimale et en apprenant à rester présent à ses sensations, la prise de parole devient progressivement plus fluide, sans changer fondamentalement le contenu.


Tableau comparatif des approches

Aspect

Approche centrée sur la performance

Approche centrée sur l’émotion

Objectif

Réussir le discours

Être présent et impactant

Stress

À éliminer

À comprendre et canaliser

Attention

Plan et contenu

Soi et public

Rapport au public

Auditoire à convaincre

Interlocuteurs à rejoindre

Effet à long terme

Épuisement possible

Progression durable

Pourquoi se faire accompagner change la donne

Travailler seul sa prise de parole conduit souvent à répéter les mêmes schémas. Un accompagnement permet de mettre en lumière des mécanismes inconscients : peur du jugement, exigence excessive, croyances limitantes.


Le coaching axé sur la gestion des émotions ne cherche pas à formater l’orateur, mais à l’aider à trouver une posture juste, alignée avec sa personnalité et ses valeurs. Cette cohérence est immédiatement perceptible par le public.



FAQ

Est-ce normal de perdre ses moyens alors que le contenu est maîtrisé ?

Oui. La maîtrise intellectuelle d’un sujet ne protège pas d’une activation émotionnelle intense. Ce sont deux registres différents qui nécessitent un travail complémentaire.


Faut-il viser l’absence totale de stress ?

Non. Un certain niveau de stress est utile et même nécessaire pour mobiliser l’attention et l’énergie. L’objectif est la régulation, pas la suppression.


Combien de temps faut-il pour se sentir plus à l’aise à l’oral ?

Cela dépend de la profondeur des blocages et de l’accompagnement mis en place. Des améliorations peuvent apparaître rapidement lorsque le travail porte sur les bons leviers émotionnels.



La prise de parole en public n’est pas qu’une question de méthode ou de talent. C’est avant tout une rencontre avec soi-même sous le regard des autres. En changeant de regard sur les émotions et en cessant de les considérer comme un obstacle, il devient possible de transformer profondément son rapport à l’oral.


Parler en public ne consiste alors plus à jouer un rôle, mais à occuper sa place, simplement, avec justesse et humanité.

 
 
 

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